121110 Un billet par an ?

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i121010a BDP Villejuif L’Hay Chevilly MIN Vitry

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Villejuif, L’Haÿ-les-Roses, Chevilly-Larue, Rungis (Min), Vitry…

La première chose à faire dans mon marasme, n’est-ce pas de retrouver le rythme d’un blog, comme celui que j’avais à la grande époque, quant mes bouteilles à la mer étaient régulièrement lues finalement, et que des inconnus m’envoyaient des méls d’encouragement, m’invitaient à la rencontre. Maintenant, c’est un peu comme si j’intériorisais tous ces billets non écrits, et qu’il pourrissaient à l’intérieur de moi.

J’ai fais différentes tentatives d’écriture depuis un ans. Toutes assez infructueuses, écrites sur différents supports quelques paragraphes sans suites. Et puis Mercredi je décroche complètement (comme de temps à autres) de toutes mes obligations pour me retrouver dans l’état de l’homme frigorifié si bien décrit par Bukowski (mes notes du 23 août). Au point que ce matin j’envisage (involontairement ?) un trajet allant d’un centre psychiatrique, Paul Guiraud à Villejuif, jusqu’à un autre centre psychiatrique, à Fresnes. Enfin c’est ce que je constate en regardant les Ign. L’étendue entre ici, Massy et Orly donne lieue à un certain nombre de mes promenades ces temps ci (voir les abums d’images sur flickr, c’est déjà ça, même si cela reste totalement hermétique à quelqu’un d’extérieur, il y a tout de même ces albums de posés là, déposés sur la toile, traces et mémoires d’un réseau de promenades comme une série de questions).

Le 24 août je suis monté sur cette fameuse butte artificielle qui surplombe l’A86 à Thiais. Malgré les images, je m’aperçois que je n’ai pas écris une seule ligne là dessus. J’ai beau chercher je ne retrouve rien, alors que j’avais le texte dans la tête ! Je l’ai évidemment oublié ce texte, à moins que je ne l’ai envoyé par sms à S. ? Dans ce cas c’est peut-être un texte que je refoule au fond de moi. La poésie comme l’amour demande d’être deux. Je suis par conséquent vraiment mal barré.

Il y a une quinzaine d’année, au beau milieu de la nuit, j’avais emmené un copain, qui squattais alors chez moi, sur cette butte artificielle d’où l’on découvre une partie de la banlieue sud… Il m’avait dis que pour vivre là… Il fallait se fabriquer des lunettes roses. C’est probablement ce que je n’ai pas cessé de faire, jusqu’à ce que je me dise assez récemment que mes lunettes roses étaient cassées ? Le coin n’est pas avenant, c’est justement pour ça qu’à répéter trop souvent des promenades « idylliques » en bord de Seine, je mets le cap si souvent sur le secteur.

Juste avant de partir, en dépliant les cartes, je n’avais aucune idée pour choisir une destination, mais la forte impression désagréable de ne plus rien avoir à découvrir dans la région parisienne, l’impression d’avoir épuisé le sujet, et que malgré cela la grisaille restait la grisaille… Découvrir avec horreur ma propre vanité à vouloirs colorisée ce décor infâme ! Alors peut-être qu’il faut faire évoluer la méthode, être un peu plus systématique, affiner la curiosité ?

Il serait par exemple présomptueux que je prétende connaître à fond Villejuif ou L’Haÿ-les-Roses. Et c’est comme ça que je me suis retrouvé au milieu du Castor du Jardin Parisien, après un passage dans les ronces, une marche arrière forcées, et avoir emprunté une rue visiblement en cul de sac. Sortie soudaine de la grisaille parfois belle de Villejuif, puis cette dame qui s’occupe de l’association des Castors avec qui on parle du grand Paris et du ressac des 13 voies de l’A6. Sur le site de l’asso, on peut d’ailleurs entendre le bruit de la mer, la vraie, pas l’autoroute… Nous parlons au moins 20 minutes, ce qui n’est pas vraiment dans mes habitudes. Extrait d’un seul coup de ma bulle. Je me retrouve là à socialiser en parlant de Cécile Duflot, du financement des lignes bleue et rouges et de la grande Couronne oubliée. Enfin surtout des raisons qui l’on fait arrivée là en 1962 en pleine crise du logement alors qu’on lui proposait un HLM à deux heures de son travail.

Je repars en faisant le tour complet du quartier par la rue Ulysse Benne, en contrebas de ces énormes murs antibruits de béton. Architectures colossales (François Kosciusko-Morizet concepteur ?) que j’observais si souvent en passant sur l’autoroute lorsque je venais d’Orléans en voiture, juste après l’échangeur A106 (qui rejoint Orly) et A6, avec ces grandes corbeilles de projecteurs suspendues le long. L’endroit exacte où je me sentais à chaque fois, enfin revenus chez moi… Les petites maisons toutes identiques mais toujours différentes ne semblent pas à l’échelle, pourtant elles arrivent de ce coté du mur à imposer leur bonne humeur, et leur amabilité face au léviathan technocratique, comme une prise de judo !

Je mets le cap sur une nouvelle butte artificielle (altimétrie 107 N.G.F. sur mon Ign). Sans accès depuis le grand ensemble qui borde l’autoroute, je passe devant l’entrée du cimetière. Cela me semble un peu morbide comme objectif… La pluie commence à tomber pour de bon et j’accélère le pas en me disant que je vais continuer bien au delà de ce cimetière de mauvais augure. Je cherche un accès à la butte sans en trouver et je m’aperçois maintenant sur l’ordi que la butte semble intégrée à l’enclos du cimetière. De là haut, on a très certainement une vue formidable sur l’échangeur (en hivers). Au milieu du pont la pluie se transforme en trombe d’eau, j’ai juste le temps de prendre une image ou deux avant, ensuite je fil sur Rungis M.I.N.. Je me réfugie sous un arrêt de bus juste avant le péage du Marché d’Intérêt National. Je bois une bière et pisse dans un coin. L’abri est assez précaire, encore un truc conçu par des gens qui passent leur vie dans un bureau. Deux magrébins égarés en fourgonnette me demande la route du terminal Orly sud, j’essaie de leur indiquer avec l’aide de ma carte, … sans même penser repartir avec eux…

Cela fait plusieurs fois récemment que je tourne autour du M.I.N., alors que j’ai le vague souvenir que l’on peut rentrer à pied et donc le traverser de part en part. Mais à chaque fois, j’ai la flemme. Le déluge passé, je marche en direction du péage. Au pied du panneau d’interdiction aux piétons, on trouve là un minuscule escalier à vis, le souvenir d’un homme à l’allure assez marginale qui l’emprunte me reviens à l’esprit. C’est assez dangereux avec l’humidité, les marches désign 60′ en béton polie (plutôt jolie par ailleurs), et l’appareil d’une main, le parapluie de l’autre. Au cas où les piétons auraient été tentés de faire du trafic de légumes frais par cet escalier on a réduit sa largeur au strict minimum… je descends sur au moins six mètres de haut, en plus du vertige cela remue : le soit-disant esprit de générosité des trente glorieuses parisiennes (de la gauche catholique aux communistes en passant par De Gaulle, Malraux et Pompidou). Ce seul et unique escalier d’accès piéton au flanc nord-ouest du M.I.N. est le condensé de la mesquinerie dont procédera toujours le Grand Paris éternel. Cet état de chose que le système voudrait nous faire avaler sans broncher.

Je traverse en diagonale sur 50 mètres, puis je suis surpris par le son d’un saxophone. Je me dis alors qu’il y a un concert sauvage ou quelque chose du genre, je passe à l’arrière d’une rangé d’une dizaine de semi-remorques. C’est comme ça que je rencontre Carlos qui s’exerce au fond de son camion Frigorifique sur un parking du M.I.N.. Reverbe cathédrale !! En fait il passe là son week-end, en attendant de sortir du chômage technique, loin de sa petite famille qu’il voit 3 jours par mois environ. Avant il était technicien spécialisé dans les bruleurs, et puis avec la crise… Son dernier voyage consistait à descendre des Ananas Brésiliens depuis la Belgique jusqu’à Rungis, Il fait aussi l’Angleterre, la Hollande, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et bien sûr le Portugal d’où il viens… Il descend souvent là bas des poulets brésiliens qui atterrissent en Angleterre. Il passe souvent en bateau de Rome à Barcelone. Il m’explique que le Portugal est pourtant beaucoup plus proche du Brésil que l’Angleterre, et donc qu’il vaudrait mieux remonter les poulets que de les descendre. Enfin je lui propose de monter un élevage sur le parking de Rungis et d’organiser un circuit court. Il est visiblement contant de travailler son français. On parle de la folie ordinaire, la notre : aux limites du pétage de plomb (lui aussi peut-être, je crois) et de la folie des États qui renflouent les banques en obtenant que l’on s’écrase…). D’où la nécessité du saxophone et peut-être de l’écriture. Il me dit que du temps de Salazar au moins les choses étaient clairs… maintenant c’est en train de redevenir pareil mais en faisant croire que… Lui fait ce métier pour ne pas vendre sa maison et faire vivre sa famille étant donné que sa femme a un temps plein à 450 euros. Et puis il me montre des images de sa Volvo surmontée d’un canoé avec lequel il descend des rivières accompagné de son frère pendant ses trois jours au pays !! Il me montre aussi sur son ordi portable quelques images des paysages qu’il traverse en Europe, saisis au vol. Il regrette qu’elles soient toutes un peu bougées. Je lui dis qu’au contraire c’est intéressant…

Il finit par me donner son mél et son facebook. Il s’emmerde vraiment Carlos sur son parking à Rungis M.I.N., même avec son ordi et son saxophone… Mais je lui explique que je dois continuer pour rentrer à Vitry pas trop tard, ça fait la deuxième belle rencontre de la journée.

Gamin je rêvais d’être routier international, je devrais peut-être faire ça !?

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1 Comments.

  1. j’aime ce texte
    et j’aime aussi les restaurants des routiers.
    je serai sur paris ce wk.. au cas où je t’emmène voir edward :-)
    bisette

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